mercredi 31 mars 2010

Obésité: rôle du défaut de récompense

Qu'un mécanisme cérébral en clair neurobiologique soit en cause dans les troubles psychiques ne fait plus aucun doute sauf pour les obscurantistes qui considèrent le cerveau comme non accessible à la raison, l'expérimentation et la compréhension moléculaire de la vie. Un retour en arrière de plusieurs siècles! Il en est de même de la boulimie, des addictions en général et de l'obésité.

Des centaines de travaux expérimentaux et cliniques ont démontré que notre système physiologique de régulation de la prise alimentaire est extrêmement sophistiqué et particulièrement adapté avec en particulier des mécanismes étonnants comme l'alliesthésie ou bien l'intervention du réseau de la récompense dans l'interruption de la prise alimentaire. L'alliesthésie représente le changement de perception d'un aliment au fur et à mesure que la prise alimentaire augmente. C'est particulièrement sensible avec le gras. En mangeant du beurre ou de la graisse animale (gras de la viande ou moëlle des os) on perçoit assez rapidement un seuil au delà duquel la poursuite de la prise alimentaire s'accompagne d'un dégoût. C'est le cas pour toute prise alimentaire brute mais beaucoup moins sensible avec des aliments transformés. Par exemple quand vous mangez des pizzas industrielles vous allez percevoir plutôt un écoeurement lié à la réplétion gastrique ou bien au gras (elles en sont bourrées) mais plus tardivement que si vous mangiez la même quantité séparément car beaucoup d'autres stimuli sont présents le sel, le sucre (oui, oui), des épices, l'amidon raffiné de la pâte qui se transforme en sucres dès l'action de la salive etc. Autre exemple très intéressant quand vous mangez un steack tartare vous percevez la sensation de satiété par l'alliesthésie beaucoup plus tôt que si vous mangiez de l'entrecôte cuite. Résultat la prise alimentaire en quantité sera plus faible avec un aliment cru qu'avec un aliment cuit ou a fortiori très cuisiné et mélangé à de nombreux autres aliments. Faites l'expérience vous serez étonné!  Les aliments transformés ont tendance à troubler notre perception olfactogustative et provoque un échappement des mécanismes de satiété.

Mais il y a plus, les aliments entraînent une activation des réseaux de la récompense et certains aliments plus que d'autres. Ceci est lié à l'importance pour la survie de la prise alimentaire autrefois en quantité limitée dans l'écosystème. Rappelons qu'en dehors de fruits et de la trouvaille risquée d'un essaim sauvage il n'y a eu aucun accès aux sucres rapides pendant 98% de l'histoire de l'humanité. Il en a été de même pour le gras introuvable en dehors ... de la moëlle des os!

Ainsi un dysfonctionnement du circuit de la récompense peut interférer avec la prise alimentaire en l'augmentant plus que de besoin ou bien en la diminuant jusqu'à mettre en danger la vie (anorexie dite à juste titre mentale).

Le circuit de la récompense fonctionne à la dopamine et possède des récepteurs spécifiques. Une anomalie qualitative ou quantitative des récepteurs peut altérer la réponse et le fonctionnement du système. C'est ce qu'ont démontré PM Johnson et P Kenny dans un article de Nature Neuroscience publié le 28 Mars 2010.
Ce qui ressort de cette étude expérimentale c'est que l'obésité s'accompagne d'un déficit dans la réponse du circuit de la récompense. Ce même déficit est observé dans l'addiction à la cocaïne ou à l'héroïne.
Tout se passe comme si la consommation d'aliments très gras ou très sucrés altérait progressivement le nombre de récepteurs D2 à la dopamine dans le cerveau. Dans la mesure où cette consommation est illimitée en raison de la prévalence et du faible coût de ces aliments dans l'agro-business ces altérations sont itératives et profondes. Cette régulation négative du nombre de récepteurs D2 est un mécanisme physiologique bien connu et de nature adaptative c'est à dire épigénétique. L'organisme c'est à dire les cellules cérébrales différenciées en l'occurrence étant exposées à des quantités élevées de sucres rapides et de graisses diminuent le nombre de récepteurs à leurs surface. Ces changements caractérisent une période dite de transition où les changements sont réversibles. Une fois les modifications épigénétiques installées, on observe une disruption de la récompense qui entraîne la consommation compulsive caractéristique des patients obèses. Il est possible d'avancer que la précocité de la dysnutrition joue un rôle important c'est à dire que la dysnutrition foetale et l'inondation des bébés par les céréales raffinées et ensuite les graisses et les amidons dès la prise de repas en cantine joue un rôle majeur dans la disruption du mécanisme de la récompense et peut expliquer l'explosion de l'obésité et du diabète sucré chez les adolescents.

Conclusion pratique
Protégez votre cerveau des sucres rapides et des aliments très gras! 
Diminuez les sucres rapides de toute sorte
Supprimez les édulcorants y compris le Stevia car l'empreinte sucrée au niveau cérébral est persistante!
Supprimez les farines blanches donc les amidons raffinés. Les céréales ne peuvent être consommées que complètes!
Privilégiez les protéines naturelles, oeufs, poissons crustacés, coquillages et viandes à l'herbe
Les feuilles sont la meilleure source d'antioxydants en particulier en jus de légumes
Analysez votre comportement et si vous observez une certaine boulimie pour tel ou tel aliment ne le mettez pas en entrée!


Référence
http://www.nature.com/neuro/journal/vaop/ncurrent/pdf/nn.2519.pdf


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